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Torture et violences sexuelles dans les conflits armés, des liens étroits. Evelyne Josse

On ne peut plus aujourd'hui, passer sous silence les travaux de notre consoeur Evelyne Josse qui est psychologue, hypnothérapeute, praticienne EMDR et consultante en psychologie humanitaire.
A l’ombre des conflits armés prolifèrent à la fois les actes de torture et les violences sexuelles. Cette fréquente association ne laisse pas d’interroger. Les agressions d’ordre sexuel commises en contexte de guerres civiles et de conflits armés répondent-elles à des stratégies politiques ? Quelles formes et quelles significations revêtent-elles ? Constituent-elles toujours des actes de torture ? Évelyne Josse analyse leurs liens avec le phénomène tortionnaire. Qu’il s’agisse des rapports entre violences sexuelles et tortures en termes de qualification juridique, de méthode de domination ou de séquelles pour les victimes, des convergences se dégagent. Ces armes d’humiliation, d’assujettissement et de terreur, demeurent de véritables machines de guerre.



Torture et violences sexuelles dans les conflits armés, des liens étroits. Evelyne Josse
Evelyne Josse, 2013
Les conflits armés sont le théâtre de la cruauté ; s’y exacerbent à la fois violences sexuelles et actes de torture. Pour fréquente qu’elle soit, cette association ne laisse pas d’interroger sur les liens entre les violences sexuelles et les actes de torture perpétrés en temps de guerre. Les agressions d’ordre sexuel répondent-elles à des stratégies politiques planifiées ? Quelles formes et quelles significations particulières revêtent ces violences ? Constituent-elles toujours des actes de torture ? Pour les victimes, les effets destructeurs de la torture stricto sensu et ceux des violences sexuelles sont-ils comparables ?

Avant de dresser un état des lieux des violences sexuelles en contexte guerrier et d’en repérer les confluences avec la torture, il est utile d’évoquer les valeurs que véhicule la sexualité et les interdits qui la gouvernent.

La sexualité, valeurs et tabous


La sexualité ne se réduit pas à la seule satisfaction physiologique des pulsions sexuelles. En effet, elle cristallise de nombreuses valeurs et de multiples tabous, tant personnels que sociaux, et se teinte de significations spécifiques en fonction de l’usage social qui en est fait : pacification, réconciliation, régulation sociale, punition, échange, transaction, provocation, domination, humiliation, contrôle, etc.

Au niveau individuel
La majorité des individus répugnent à envisager la sexualité hors d’un contexte précis. Par exemple, selon les cultures et les individus, les rapports pratiqués hors d’une relation amoureuse ou maritale, non consentis par l’une des parties ou avec un partenaire du même sexe provoquent détresse et humiliation.

Au niveau sociétal
Du côté des filles et des femmes. La capacité sexuelle et reproductive confère aux femmes un rôle prépondérant dans la construction et la préservation de l’identité clanique, ethnique et culturelle d’une population. Par leur mariage, les groupes s’allient et ces alliances sont renforcées par la progéniture qui naît des unions. Aussi n’est-il pas étonnant que la sexualité fasse l’objet d’un contrat social [1] et que toutes les sociétés en régulent, codifient, fixent, voire légifèrent, l’accès. Ainsi, par exemple, dans la plupart des cultures traditionnelles, les relations sexuelles ne sont permises qu’au sein d’une union consentie par les familles et légitimée par les liens du mariage. Quant aux noces, elles ne sont le plus souvent concevables qu’avec un individu d’une ethnie, d’une tribu, d’une caste ou d’une religion déterminées. Envisager des relations intimes ou des épousailles dans tout autre cadre est prohibé.

Les agressions sexuelles contreviennent à toutes les règles présidant aux conditions sociales de la sexualité. Elles exposent généralement les victimes à la stigmatisation, voire à la discrimination et compromettent considérablement leur bien-être social. Dans de nombreuses sociétés, les croyances et les préjugés les désignent comme responsables des sévices qu’elles ont subis et justifient leur disgrâce communautaire. En effet, le viol et autres actes sexuels forcés sont assimilés à l’adultère ; ils sont attribués à un sortilège maléfique châtiant un comportement inconvenant (par exemple, à l’égard d’un membre de la famille) ou à la punition divine de péchés qu’auraient commis les infortunées ou bien encore, considérés comme la conséquence méritée d’une pulsion qu’elles auraient provoquée par leur tenue vestimentaire ou leur attitude.

Du côté des hommes. La virilité distingue non seulement les hommes des femmes mais elle classe également les individus masculins selon un axe vertical au sommet duquel se hissent les hommes « dignes de ce nom » et au bas duquel sont relégués les « sous-hommes ». Dans les contextes de guerre, les hommes doivent être valeureux, ce qui concoure au renforcement des critères et des valeurs propres à l’identité masculine. Les individus doivent être capables d’affirmer leur virilité et de passer pour des « durs » sous peine d’être considérés comme des « tapettes », des « femmelettes » ou des « chochottes » et de perdre leur honneur. Les agressions sexuelles commises à l’égard des hommes constituent un moyen de conquérir le pouvoir ainsi qu’un instrument de contrôle et d’humiliation. Elles servent aux belligérants à affirmer leur force et à marquer leur dominance ; elles visent à déshonorer les vaincus, à montrer qu’ils sont incapables de défendre leur honneur et de prouver qu’ils sont de vrais hommes.

Les agressions sexuelles corrompent l’identité sexuée des hommes et leur dérobent leur virilité. Elles produisent une mutation radicale dans la manière dont ils se perçoivent et induisent une modification des rapports sociaux au sein de la communauté. En effet, dans la plupart des sociétés, les hommes violés sont déconsidérés ; ils risquent d’être affligés d’une réputation d’homosexuel et en conséquence, d’être rejetés par leur épouse et d’être mis au ban de leur communauté.
Au vu de l’importance que revêt la sexualité pour les individus et pour les communautés, il n’est pas étonnant que les violences d’ordre sexuel se rencontrent dans les conflits armés et que les tortures s’accompagnent fréquemment de sévices sexuels.

Les formes de violence sexuelle dans les contextes de conflit armé

Les formes de violences sexuelles perpétrées dans les contextes de conflit armé sont multiples et diverses.
Le viol comme méthode de guerre. On parle de viol comme arme de guerre ou comme méthode de guerre lorsqu’il est planifié par une autorité politico-militaire et utilisé de manière stratégique par une des parties d’un conflit pour humilier, affaiblir, assujettir, chasser ou détruire l’autre. Il s’agit généralement des viols de masse (perpétrés sur de nombreuses victimes), multiples (une victime est agressée à plusieurs reprises) et collectifs (la victime est agressée par plusieurs assaillants), fréquemment commis en public, accompagnés le plus souvent de brutalités et de coups.

Le viol comme arme de guerre constitue une forme d’attaque contre l’ennemi. Il caractérise la conquête et l’avilissement des femmes incarnant l’identité culturelle adverse, l’humiliation des hommes en charge de leur protection mais impuissants à les défendre ainsi que le déshonneur des combattants capturés. Perpétré avec la volonté délibérée de semer la terreur, l’infamie et les germes du rejet social, il est une arme de destruction psychique et communautaire. Outre la volonté de semer la peur et la honte, le viol peut être utilisé dans le but de contaminer les rivales et de propager le virus du VIH/SIDA.

La terminologie du Comité International de la Croix-Rouge désignant le viol comme « méthode de guerre » est plus judicieuse, car plus large, que celle de viol comme « arme de guerre ». Une arme est utilisée dans l’intention d’infliger une blessure ou de tuer. Dans les conflits armés, le viol peut servir ces fins mais également être exploité pour des raisons plus perfides comme polluer l’ethnicité d’une communauté. Par exemple, durant le conflit en ex-Yougoslavie, les combattants serbes recouraient au viol et aux grossesses forcées pour pervertir la « race » de leur ennemi et anéantir le futur de la communauté bosniaque. Dans l’Est du Congo, les combattants Hutus originaires du Rwanda [2] utilisent cette stratégie pour forcer les femmes congolaises à donner naissance à des enfants porteurs de leur identité culturelle et ce, dans le but délibéré de s’implanter civilement dans la région qu’ils occupent militairement.

Autres formes de viol commis par les belligérants. De tous temps, les agressions sexuelles ont fait partie des traditions guerrières. Elles le restent malgré la ratification de lois internationales et de codes militaires les interdisant et les sanctionnant. Toutes les exactions commises durant un conflit armé ne servent toutefois pas d’armes de guerre. En effet, les agresseurs ne poursuivent pas nécessairement un plan stratégique et tactique édicté par leurs supérieurs ; ils agissent fréquemment de leur propre initiative.

Le viol comme hymne à la virilité du combattant. Certains viols sont une récompense octroyée aux combattants par les autorités militaires. Les supérieurs hiérarchiques autorisent parfois, voire encouragent leurs troupes à commettre des viols sur les populations civiles pour les récompenser des services rendus, exalter leur bravoure et doper leur moral. De même, après une victoire, il n’est pas rare que les vainqueurs violent les filles et les femmes des vaincus considérées comme un butin de guerre et parfois, qu’ils agressent sexuellement les hommes dans l’intention de les humilier.

Le sexe de confort. Les combattants sont généralement jeunes et sexuellement actifs, célibataires ou séparés de leur famille (manque affectif et sexuel), sommairement instruits (ignorance des lois) et soustraits au contrôle social de leur communauté d’origine (absence d’agent régulateur des conduites considérées comme inadmissibles), parfois intégrés dans des unités de combat peu structurées et peu encadrées. De plus, ils jouissent d’une impunité quasi assurée (silence des victimes, tolérance des autorités quant aux agressions sexuelles, désorganisation des systèmes policiers et judiciaires, etc.) et consomment fréquemment de substances psychoactives (alcool, drogues) aux effets désinhibiteurs. Tous ces facteurs contribuent eux aussi à l’explosion des viols des filles et des femmes dans les situations de conflits armés. De même, pour humilier leurs victimes mais également pour assouvir leurs propres pulsions sexuelles, des agents pénitenciers peuvent faire subir des agressions sexuelles aux détenus, femmes et hommes, prisonniers de guerre.

Le sexe de confort « organisé ».
Des filles et des femmes sont enlevées par des combattants et séquestrées dans leur campement. Dans certains cas, elles sont considérées comme l’épouse d’un seul homme ; dans d’autres, elles sont les esclaves sexuelles de la troupe. Outre les services sexuels, elles sont chargées des tâches domestiques, agricoles et militaires. L’esclavage sexuel est parfois organisé et planifié par les autorités militaires. Ainsi, des fillettes et des femmes sont kidnappées pour assouvir les besoins sexuels des forces armées. Elles sont prostituées de force dans des casernes ou dans des bordels sous contrôle militaire. Pendant la seconde guerre mondiale, les femmes contraintes de se prostituer pour l’armée et la marine impériale japonaise ont été appelées « femmes de confort » ou de « réconfort ». Plus récemment, durant la guerre en ex-Yougoslavie, des filles et des femmes ont été victimes de la traite des êtres humains pour rencontrer la demande en prostituées émanant des membres des forces internationales de maintien de la paix stationnées dans la région.

L’inceste et le viol forcé d’un proche. Dans certains contextes, des femmes et des hommes sont contraints par les agresseurs à se livrer à des relations sexuelles avec des membres de leur famille (entre mère et fils, père et fille, frère et sœur, tante et neveu).

Les actes sexuels forcés avec un codétenu ou un homme de la communauté. Des soldats, des gardiens de prison ou des policiers forcent les hommes à avoir des rapports sexuels entre eux comme forme de « divertissement ».

Les rapports sexuels contre-nature. Les individus, femmes et hommes, sont parfois contraints par leurs bourreaux à se livrer à des relations sexuelles avec un animal.

Le spectacle du viol des membres de sa famille perpétré par les belligérants ou par des membres de la communauté de la victime forcés par les agresseurs de commettre ces agressions.
Des familles sont contraintes à assister au viol de leurs proches, le plus souvent de l’épouse, de la mère, des sœurs ou des enfants. Il leur est parfois imposé de danser, d’applaudir ou de chanter pendant la durée du viol. On les force aussi à faciliter l’agression, par exemple, en immobilisant la victime pour l’empêcher de se débattre, en fournissant de l’huile pour lubrifier le sexe d’un enfant et permettre ainsi la pénétration, etc. Outre les dommages causés à la victime, ce type de viol vise à blesser l’amour propre et l’honneur des hommes de son entourage qui n’ont pas pu la défendre.

Les brutalités exercées sur les zones génitales et la destruction des fonctions reproductives. Des tortures et des mutilations sexuelles sont souvent infligées aux filles et aux femmes de la communauté adverse (éventration des femmes enceintes, mutilation des organes génitaux, intromission d’objets dans les parties génitales, etc.), avant, pendant ou après un viol. Les organes sexuels des hommes, notamment lorsque ces derniers sont incarcérés, sont fréquemment le siège des tortures (décharges électriques, coups, torsions, introduction d’objets dans l’anus, mutilations et amputation des organes génitaux, etc.).


Rédigé le 03/04/2013 modifié le 14/04/2015

Laurent GROSS
Laurent Gross, Hypnothérapeute à Paris, Thérapeute EMDR - IMO. Formateur & Président du Collège... En savoir plus sur cet auteur

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